Victoryne Moqkeuz, mon anagramme

Caroline Bordczyk, mon pseudo d'auteure

18 octobre 2016

LE PETIT POIS

Classé dans : — eructeuse @ 9 h 52 min

Texte écrit en septembre 2013

Dans le monde merveilleux d’Utopie, le grand hôpital de la vie, rue de la confrérie, la mort ne dîne ni ne dort dans ses boyaux, car ici, dame maladie y est bannie.

Telle pourrait être aussi l’autre devise du village commercial à son entrée qui vente les dernières découvertes laborantines sur son écran géant : « Cher client, à chaque contrariété, la pilule est adaptée, souriez, l’avenir est à porté de chaque bourse… Ici aussi, la discrimination sociale est vaincue, point de souci »

« A coups d’écus, ajoute Sophie, arpentant depuis belle lurette, les couloirs de la Fratrie, belle appellation, sourit-elle, en ajoutant, nous sommes tous égaux dans la courtoisie… ».

Sophie c’était la folle, celle qui vivait avec sa fiole, celle qui passait riait, par ci par là, celle qui n’avait rien, juste de la souffrance… « Bah quelques caillots de sang, quelques douleurs dans le calbot, quelques repères sans père ni mère, quelques pertes de vocabulaire, le langage ce n’est pas une affaire, ne fait pas de moi une malade, ô pardon, une cliente à part entière, juste imaginaire » se moqua-t-elle… Puis elle tomba de son vélo, non imaginaire celui-là, se cassa le pied et le menton, le nez et les rayons de son illumination quand il lui annoncèrent une sale affaire qui lui débordait les sinus pour lui envahir cervelle et fierté rebelle qu’ils voulurent lui arracher d’elle. Mais elle se cabra, revendiqua sa présence et fixa la sienne de déchéance, face aux six mois de la leur, et partit porter plainte contre celle qu’on lui fit, de refuser sa lobotomisation…en haut lieux, ne pensant pas un seul instant qu’on entende mieux en hauteur, les douleurs des petits d’un monde toujours bas…Le greffier nota : plainte contre la connerie… en osant les épaules…

Depuis sept ans, Sophie cultivait, patiente, auprès de sa maladie qu’elle savait présente, un petit pois qu’elle bichonnait jour après jour, on ne vit bien qu’accompagnée… Puis vint le jour de sa convocation, son ô raison funèbre…

Elle mit sous sa cape de velours bleu, une longue robe couleur de ses yeux ciel puis ses souliers vermeils, sortie sa brouette repeinte en vert bouteille et descendit le chemin vers le palais de sa juste cause… Elle refusa de quitter sa brouette et se présenta ainsi, partiale, au juge qui n’entendait mot de la plainte de cette malade…avec son gros petit pois qui symbolisait dit-elle, la taille symbolique de sa tumeur, mais aussi la taille de la connerie humaine dans le cerveau de quelques mandarins, de vrais sceptiques mais pas question fric.

Pauvre pauvre petite bonne femme qui voulait juste montrer le poids de la connerie d’un système qui voit dans la chaire, une clientèle…

« Mon petit pois à la grosseur de ma folie et de votre connerie et si je suis une cliente, le mandarin est un commerçant, et ce n’est pas ainsi que je l’entends, ma maladie m’appartient, je repars avec, vous l’avez niée si longtemps, me désignant la folle, alors que je vous la disais si présente, et vous voudriez aujourd’hui que je vous la livre sans mot dire ? Je vous laisse à vos charcuteries, j’ai une vie à finir et certainement pas aux creux de vos bistouris, j’ai encore des rires à vivre… »

Elle fut condamna pour injure et parjure mais put finir ses quelques mois de vie comme elle avait choisi. Elle était heureuse d’avoir fait ce qu’elle estimait impérial à savoir, aller au bout de ce qu’elle pensait, dire ce que son cœur encore libre de tumeur, mais plein de cette bonne humeur qui ne la rendait si différente, que son petit pois avait le poids de ses convictions… et qu’elle partirait avec raison.

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