Gertrude s’arrêta, tendit l’oreille, en se cachant derrière un grand pin, et écouta le doux chant du berger qui se dirigeait vers de gros rochers… Elle le suivit, le vit disparaître, lui et son troupeau et entendit la source couler…
Que devait-t-elle faire ? Il lui fallait trouver Ahcize. Elle poursuivit sa course et se dit qu’au retour elle retrouvait ce drôle de troubadour !
Elle essaya de suivre le bruit de l’eau et se rendit compte qu’elle ne descendait pas vers la vallée mais allait vers un autre Mont qui était au delà du pays des Langues Fourchues, comme l’indiquait une pancarte : « Ici luit le pays du Chant Joli »…
Alors elle comprit ! Elle comprit que le cours de la source avait été détourné. Comment était-ce possible et pourquoi ? Qui avait pu faire ça ? Elle continua son exploration et vit l’endroit où la source jadis se séparait en deux, là où elle avait été bloquée…
L’œil d’Ahvisé, l’espion de la Fée Tide prévint sa maîtresse qu’une personne avait dépassé le lieu du Bonné ! Fée Tide forte de sa baguette des plus ragoutantes fonça vers le lieu secret en liesse ! Mais sa présence détectée par Deubou, la fille d’Ahcize, ondulante comme une source, la mit face à un guerrier qui lui dit :
« où vas-tu sorcière? Ici n’est point ton domaine, chacal puant !
- Arrête les compliments avec ton chien aux chausses de donzelle ! »
Hector qui avait reçu des gouttelettes scintillantes de la baguette de Deubou avait été – mais c’était l’hiver – transformé de berger en puissant guerrier…
Un combat sans merci se livra encore Hector et Tide. Quant à son chien Balthazar, il devint un dragon luisant qui hurla :
« Toi la givrée qui sent le purin et la graisse ! Tu veux aussi sentir mes griffes de donzelle ? Espèce de sexiste !
Ce qui eut pour effet de remplir Tide de haine et de décupler ses forces, bien contente de mener une bataille !
- Viens petit roquet prétentieux, je vais t’occire et te faire mijoter dans l’ail et la graisse de bestiaux ! »…
Un combat sans merci se livra entre Hector et Tide ! Le combat aurait pu être sanglant ! Mais Hector réussit à pousser Tide dans la source ! Elle se débattit en hurlant :
« Aux diables ! Aux sorcières ! Au secours ! Je fonds je fonds…Aaaah… »
C’est ainsi que Fée Tide devint Fée Tiède et perdit toute propension à la diatribe serpentueuse…
Hector et Gertrude portés par le dragon arrivèrent au château, où la populace apeurée, courrait chercher refuge dans quelques cachettes sauveuses…
Puis un calme olympien remplit l’espace. On aurait dit qu’une onde magique balayait le ciel ! Tous arrêtaient le travail, dans les champs, les carrières, les boutiques, partout Un chant merveilleux s’élevait et parcourait le pays des Langues fourchues…
Le chant de Gertrude, si doux si doux si harmonieux brisa les chaînes invisibles qui retenaient depuis des décennies les mots d’amour, du bonheur et de la joie…
Un feu d’artifice fit disparaître les pancartes portant cet affreux nom ainsi que toutes les méchancetés du roi se demandant ce qui lui arrivait… Il prit sa fille dans ses bras et lui dit : « Ma chère enfant ! »
Au pays des chants heureux, sonnaient les cloches pour annoncer le mariage de deux amoureux sous l’œil attendri d’un papa qui avait abdiqué pour sa digne et courageuse fille ! Il va s’en dire qu’au banquet, des biscuits beurrés étaient servis, sous l’œil d’un chien ravi !